Traditions

 

 Le costume paysan

Le costume traditionnel paysan, malgré sa disparition irréversible dans un avenir proche, reste la coutume la plus surprenante de notre village en ce début de 21ème siècle. En effet, quelques paysannes le portent encore quotidiennement malgré les grandes difficultés liées au maintien de cette garde-robe inadaptée à notre époque moderne. Si cette tenue est aujourd'hui le Costume Alsacien par excellence, elle a depuis des temps immémoriaux été le vêtement typique des paysans et paysannes du Kochersberg et du Pays de Hanau et, en ce qui nous concerne, tout particulièrement dans les villages voisins de Mietesheim, d'Engwiller, d'Offwiller et d'Uhrwiller. Dans notre village, le costume traditionnel masculin est passé de mode chez les jeunes hommes au lendemain de la première guerre mondiale dès que ceux-ci ont eu des contacts avec un monde différent de la paysannerie comme le travail en usine ou d'autres métiers de l'industrie. Certaines épouses, dont les plus jeunes sont nées dans les années 1920, l'ont conservé jusqu'à nos jours. Ce costume a également été pour nos anciens une façon d'affirmer leur identité au cours des vicissitudes de l'histoire mouvementée de notre région.

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La tenue masculine
Elle se compose d'un pantalon à pont en bombasin noir, à bretelles et à poches plaquées sur le devant. La couture latérale et les poches accusent 3 nervures dans le tissu. Au dessous des poches, sur cette couture latérale, sont cousus six boutons dorés. Ces boutons disparaissent sur les pantalons des hommes mariés. Au cours du 19ème siècle, ce pantalon remplace au fur et à mesure la culotte fermée sous le genou et taillée dans la même étoffe. Elle disparaît au début du 20ème siècle. Avec cette culotte, les paysans portaient des guêtres en étoffe. La chemise est en lin blanc à plastron en dentelle amidonnée et brodé aux initiales du propriétaire. Par dessus, se portait le gilet en bombasin rouge garance à deux rangées de treize à vingt boutons dorés. La légende veut que la couleur rouge de ce gilet, dont l'origine est un morceau de tissu destiné à protéger la poitrine d'où l'appellation locale de Brusttuch, serait issue de la sanglante guerre des Paysans en 1525. La veste en bombasin noire à col d'officier est courte et porte deux rangées de boutons identiques au gilet. Elle remplace la sobre redingote qui ne porte aucun ornement, ne serait-ce qu'un ruban en soie noire servant de fermeture. Autour du cou, le paysan porte un foulard noué par un nœud plat et dont les bout sont fixés sous les bretelles. Ce foulard est en soie noire pour les festivités. Le chapeau est à large bord gansé. Il remplace le tricorne à calotte et à large bord relevé à l'arrière et disparu à la fin du 19ème siècle. 

La tenue féminine
Contrairement à l'idée reçue, le costume traditionnel et plus particulièrement l'habit féminin a subi de nombreux changements de mode retardés par l'éloignement des grands centres urbains. Il en est ainsi pour l'évolution de la coiffe qui est l'élément le plus connu, mais malheureusement aussi le plus caricaturé. A son origine, il s'agit d'un bonnet avec un petit nœud noué sur le front. Son évolution varie avec la largeur du ruban qui va aboutir à une taille démesurée vers 1910. Le nœud se redresse au fur et à mesure et se transforme en une forme plissé avec beaucoup de soin. La coiffe est exclusivement de couleur noire. Seule la coiffe à clinquants de la mariée (Bàzzelekàpp), encore en usage à la fin du 19ème siècle, rappelle que ce nœud a peut-être été également de couleur rouge. La robe traditionnelle est composé de deux parties, la jupe et le corselet. Ce dernier est souvent en étoffe de qualité et différente de celle de la jupe sur laquelle elle est cousue. Ce tissu peut être du velours broché, fleuri ou en soie incrustée de décors argentés. La jupe est au départ en bombasin de couleur sombre, noire ou bleu foncé. Plus tard apparaissent les jupes en tissu précieux comme la soie, le taffetas, le reps ou le satin de Chine. Aux anciennes couleurs, s'ajoutent le vert, le bleu clair, le violet et le rouge. C'est cette dernière couleur que les jeunes femmes arborent pour les festivités profanes alors qu'elles se sont imposées certaines règles de couleurs tout au long de l'année - le noir pour les grandes fêtes et pour le deuil, le bleu foncé ou violet pour Noël, le bleu clair ou azur pour Pâques et le vert pour la Pentecôte et le Messti. Il n'est cependant pas permis de faire un rapprochement systématique avec les couleurs usuelles de l'année liturgique du culte chrétien. Les robes de couleur sont ornées sur le bas par une large bande de velours fleuri alors que les robes noires pour plusieurs galons de velours noirs. Le nombre de ces galons devait aller de pair avec la fortune de la paysanne. Par dessus leur chemise, les femmes du 19ème siècle portaient une sorte de casaque très courte ou Mützel, ouverte sur le devant. Cette ouverture recevait le plastron, à l'origine une pièce de tissu pour protéger  le haut de la poitrine, qui évolue pour devenir une véritable pièce d'orfèvrerie. Vers 1880 apparaît le Kàsseweck qui remplace cette casaque et l'ouverture disparaît car le devant se ferme au ras du cou. La taille des foulards varie selon la saison de même que la couleur et la qualité des étoffes. Souvent les foulards et châles sont en soie, en cachemire ou en taffetas. Les grands châles portent également des motifs multicolores brodés. Le tablier, qui sert de protection des habits pour les travaux domestiques, devient un élément décoratifs de grande qualité pour les tenues de meilleur présentation. Le choix des étoffes est soumis aux tendances de la mode, véhiculées par les marchands ambulants qui approvisionnent les campagnes. Les tabliers sont en soie moirée, en taffetas ou en satin de Chine. 

 Les valets de Pentecôte

Chaque année, le dimanche de Pentecôte, les garçons d'âge scolaire, équipés de deux couvercles de marmite, se rassemblent. En rangs serrés, les petits devant, les grands derrière, ils parcourent les rues et ruelles du village en claquant ces couvercles l'un contre l'autre en provoquant ainsi un vacarme assourdissant destiné à effrayer les esprits malfaisant. Cette coutume est apparue au lendemain de la dernière guerre mondiale et aurait été copiée sur une habitude d'un village voisin. Elle remplace une tradition plus ancienne encore et jadis pris en charge par les valets des fermes. Ceux-ci de part leurs habitudes de travail, étaient très habiles à manier le fouet et parcouraient les rues en les faisant claquer avec force. Avec la disparition de ces valets de ferme, ce sont les garçons qui, après s'être préalablement bien exercés, ont repris cette tradition jusqu'au moment où l'approvisionnement des fouets dits de Perpignan a été très difficile. Comme chaque effort mérite salaire, c'est le lundi de Pentecôte que ces même valets, et plus récemment les garçons, dès les premières heures de la matinée commencent une quête bien particulière. Par classe d'âge, les grands d'abord, ils se rendent de maison en maison pour réclamer leur dû. L'un d'entre eux est porteur du Maïe, sapin ou arbrisseau décoré préalablement par les filles de leur classe d'âge de fleurs en papier multicolores. C'est lui qui récite à chaque station le même verset : 

 Dù kùmme de Uhrwiller Pfinschde Büewe
Sie welle a Hàfe voll kochdi Rüewe
Kochdi Rüewe senn nett güet
Liewer a àlder Scheihüet
Drei Eier e'rüss
Odder ech scheck de Màrder enn's Hienerhüss 

 

Le Màrder en question est un personnage qui se veut effrayant au visage noirci à la suie. Il est en outre muni d'un imposant bâton sculpté. C'est de bonne grâce, et en remerciement de l'acte profane perpétré la veille, que les paysannes lui remettent les victuailles demandées recueillies dans son chapeau. Il les dépose dans un panier porté par deux de ses camarades et garni de foin ou de sciure pour éviter de casser les œufs. Le tour du village accompli, c'est autour d'une énorme omelette qu'ils festoient en compagnie des filles qu'ils ont préalablement invitées. Les œufs non consommés sont mis en vente et la recette partagée. Les valets de fermes de jadis ne se contentaient pas de recueillir des œufs, mais également du lard et du vin qui leur permettaient une fois par an de ripailler aux frais de la communauté. Le verset en langue allemande qu'ils récitaient ou chantaient était adapté à leur requête : 

Da kommen die Uhrwiller Pfingstenknecht,
Sie wollen haben das Pfingstenrecht,
Das Pfingstenrecht soll euch nicht verdrießen,
Ein Budell Wein zum Fenster hinaus gießen,
Ein Stück Speck von der Mohre Seide weg,
Net so groß, net so klein,
Schneid ein wenig weiter hinein,
Ein halb Mass Wein in den Kübel hinein,
Da wollen wir alle zufrieden sein,
Vier Eier e'rüss
Odder ech scheck de Màrder enn's Hienerhüss

 

 Le Messti

Célébré jadis le jour de le dimanche le plus proche de la Saint Michel, patron du village, la date du messti a été plusieurs fois changée et est fixée actuellement au milieu du mois d'octobre. Si cette fête est issue d'une célébration religieuse (Messtag ou Kirchweih), elle depuis longtemps considéré comme fête profane et célébrée comme telle. Le personnage central en est le Messtiburscht.  A la suite d'une adjudication très disputée auprès des autorités locales, c'est lui qui s'était attribué le droit d'organiser les festivités et d'en retirer les bénéfices sur la vente des boissons et des diverses attractions. Plus tard, à la suite de l'abolition des droits féodaux, son rôle d'organisateur va disparaître, mais il lui restera le privilège de demander l'autorisation d'ouvrir les festivités auprès du maire. C'est de cette tradition qu'est issue la célébration actuelle du Messti local et reprise au début des années 1960 par les conscrits. En cortège, animé par l'harmonie de musique et précédé par le drapeau de la classe aux armes du village, trois couples en costume local vont respectivement rendre visite au maire et à ses adjoints auxquels ils vont remettre une bouteille de vin et un biscuit en remerciement de l'autorisation verbale et symbolique d'ouverture des réjouissances qu'ils vont se hâter de mettre en application pendant les trois jours suivants 

 Les noms de fermes.

Notre village, dans sa forme ancienne, était essentiellement constitué de fermes plus ou moins imposantes. Tout comme dans les autres villages de notre région, ces habitations portent des appellations, en dialecte Hoftnàmme, qui ont longtemps servi d'adresse avant l'apparition de la numérotation. Mais ces noms ont également permis de distinguer les familles dont les patronymes ressemblaient, endogamie oblige. Encore de nos jours, il est souvent difficile de retrouver des homonymes habitant notre localité sans connaître leur adresse exacte. Tous comme les noms de famille, ces appellations peuvent être regroupées en quatre catégories :

  1. ceux qui trouvent leur origine simplement dans les noms patronymiques parfois suivis par un prénom

  2. ceux qui évoquent un ou plusieurs prénoms masculins ou féminins associés.

  3. ceux qui évoquent une profession souvent associée à un prénom

  4. ceux qui évoquent un surnom, le lieu d'origine d'une personne extérieure arrivant au village ou une indication géographique de la ferme.

Si l'origine des trois premières se retrouvent souvent au fil des recherches généalogiques des propriétaires, il n'en est pas ainsi pour la dernière catégorie. Certains de ces Hoftnàmme sont très récents et d'autres remontent au 17ème siècle à l'époque des immigrants qui ont repeuplé notre village au lendemain de la désastreuse Guerre de Trente Ans.